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La Mécanique nouvelle (Göttingen)

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LA MÉCANIQUE NOUVELLE
Göttingen, 28 avril 1909


Mesdames, messieurs

Aujourd’hui, je suis obligé de parler français, et il faut que je m’en excuse. Il est vrai que dans mes précédentes conférences je me suis exprimé en allemand, en un très mauvais allemand : parler les langues étrangères, voyez-vous, c’est vouloir marcher lorsqu’on est boiteux ; il est nécessaire d’avoir des béquilles ; mes béquilles, c’étaient jusqu’ici les formules mathématiques et vous ne sauriez vous imaginer quel appui elles sont pour un orateur qui ne se sent pas très solide. — Dans la conférence de ce soir, je ne veux pas user de formules, je suis sans béquilles, et c’est pourquoi je dois parler français.

En ce monde, vous le savez, il n’est rien de définitif, rien d’immuable ; les empires les plus puissants, les plus solides, ne sont pas éternels : c’est là un thème que les orateurs sacrés se sont plu bien souvent à développer. — Les théories scientifiques sont comme les empires, elles ne sont pas assurées du lendemain. Si l’une d’elles semblait à l’abri des injures du temps, c’était, certes, la mécanique newtonienne : elle paraissait incontestée, c’était un monument impérissable ; et voilà qu’à son tour, je ne dirai pas que le monument est par terre, ce serait prématuré, mais en tout cas il est fortement ébranlé. Il est soumis aux attaques de grands démolisseurs : vous en avez un parmi vous, M. Max Abraham, un autre est le physicien hollandais M. Lorentz. Je voudrais, en quelques mots, vous parler des ruines de l’ancien édifice et du nouveau bâtiment que l’on veut élever à leur place. —

Tout d’abord qu’est-ce qui caractérisait l’ancienne mécanique ? C’était ce fait très simple : je considère un corps en repos, je lui communique une impulsion, c’est à dire je fais agir sur lui, pendant un temps donné une force donnée ; le corps se met en mouvement, acquiert une certaine vitesse ; le corps étant animé de cette vitesse, faisons agir encore la même force pendant le même temps, la vitesse sera doublée ; si nous continuons encore, la vitesse sera triplée après que nous aurons une troisième fois donné une impulsion identique. Recommençons ainsi un nombre suffisant de fois, le corps finira par acquérir une vitesse très grande, qui pourra dépasser toute limite, une vitesse infinie.

Dans la nouvelle mécanique, au contraire, on suppose qu’il est impossible de communiquer à un corps partant du repos une vitesse

supérieure à celle de la lumière. Que se passe-t-il ? Je considère le même corps au repos ; je lui donne une première impulsion, la même que précédemment, il prendra la même vitesse ; renouvelons une seconde fois cette impulsion, la vitesse va encore augmenter, mais elle ne sera plus doublée ; une troisième impulsion produira un effet analogue, la vitesse augmente mais de moins en moins, le corps oppose une résistance qui devient de plus en plus grande. Cette résistance, c’est l’inertie, c’est ce qu’on appelle communément la masse ; tout ce passe alors dans cette nouvelle mécanique comme si la masse n’était pas constante, mais croissait avec la vitesse. Nous pouvons représenter graphiquement les phénomènes : dans l’ancienne mécanique, le corps prend après la première impulsion une vitesse représentée par le segment  ; après la deuxième impulsion s’accroît d’un segment qui lui est égal, à chaque nouvelle impulsion, la vitesse
s’accroît de la même quantité, le segment qui la représente s’accroît d’une longueur constante ; dans la nouvelle mécanique, le segment vitesse s’accroît de segments , ,… qui sont de plus en plus petits et tels que nous ne pouvons pas dépasser une certaine limite, la vitesse de la lumière. Comment a-t-on été conduit à de telles conclusions ? A-t-on fait des expériences directes ? Les divergences ne se produiront que pour les corps animés de grandes vitesses ; c’est alors seulement que les différences signalées deviennent sensibles. Mais, qu’est-ce qu’une très grande vitesse ? Est-ce celle d’une automobile qui fait 100 kilomètres à l’heure ; on s’extasie dans la rue sur une telle rapidité ; à notre point de vue, c’est pourtant bien peu, une vitesse d’escargot. L’astronomie nous donne mieux : Mercure, le plus rapide des corps célestes parcourt lui aussi 100 kilomètres environ, non plus à l’heure mais à la seconde : pourtant, cela ne suffit pas encore, de telles vitesses sont trop faibles pour révéler les différences que nous voudrions observer. Je ne parle pas de nos boulets de canon, ils sont plus rapides que les automobiles, mais beaucoup plus lents que Mercure ; vous savez cependant qu’on a découvert une artillerie dont les projectiles sont beaucoup plus vite : je veux parler du radium qui envoie dans tous les sens de l’énergie, des projectiles ; la rapidité du tir est bien plus grande, la vitesse initiale est de 100 000 kilomètres par seconde, le tiers de la vitesse de la lumière ; le calibre des projectiles, leur poids, sont, il est vrai, bien plus faibles et nous ne devons pas compter sur cette artillerie pour augmenter la puissance militaire de nos armées. Peut-on expérimenter sur ces projectiles ? De telles expériences ont

été effectivement tentées ; sous l’influence d’un champ électrique, d’un champ magnétique il se produit une déviation qui permet de se rendre compte de l’inertie et de la mesurer. On a constaté ainsi que la masse dépend de la vitesse et énoncer cette loi : L’inertie d’un corps croît avec sa vitesse qui reste inférieure à celle de la lumière, 300 000 kilomètres par seconde.

Je passe maintenant au deuxième principe, le principe de relativité. Je suppose un observateur qui se déplace vers la droite ; tout se passe pour lui comme s’il était au repos, les objets qui l’entourent se déplaçant vers la gauche : aucun moyen ne permet de savoir si les objets se déplacent réellement, si l’observateur est immobile ou en mouvement. On l’enseigne dans tous les cours de mécanique, le passager sur le bateau croit voir le rivage du fleuve se déplacer, tandis qu’il est doucement entraîné par le mouvement du navire. Examinée de plus près, cette simple notion acquiert une importance capitale ; on n’a aucun moyen de trancher la question, aucune expérience ne peut mettre en défaut le principe : il n’y a pas d’espace absolu, tous les déplacements que nous pouvons observer sont des déplacements relatifs. Ces considérations bien familières aux philosophes, j’ai eu quelquefois l’occasion de les exprimer : j’en ai même recueilli une publicité dont je me serais volontiers passé, tous les journaux réactionnaires français m’ont fait démontrer que le soleil tournait autour de la terre ; dans le fameux procès entre l’Inquisition et Galilée, Galilée aurait eu tous les torts.

Revenons à l’ancienne mécanique : elle admettait le principe de relativité ; au lieu d’être fondées sur des expériences, ses lois étaient déduites de ce principe fondamental. Ces considérations suffisaient pour les phénomènes purement mécaniques, mais cela n’allait plus pour d’importantes parties de la physique, l’optique par exemple. On considérait comme absolue la vitesse de la lumière relativement à l’éther : cette vitesse pouvait être mesurée, on avait théoriquement le moyen de comparer le déplacement d’un mobile à un déplacement absolu, le moyen de décider si oui ou non un corps était en mouvement absolu.

Des expériences délicates, des appareils extrêmement précis, que je ne décrirai pas devant vous, ont permis d’essayer la réalisation pratique d’une pareille comparaison : le résultat a été nul. Le principe de relativité n’admet aucune restriction dans la nouvelle mécanique ; il a, si j’ose ainsi dire, une valeur absolue.

Pour comprendre le rôle que joue le principe de relativité dans la Nouvelle Mécanique, nous sommes d’abord amenés à parler du temps apparent, une invention fort ingénieuse du physicien Lorentz. Nous supposons deux observateurs l’un A à Paris, l’autre B à Berlin. A et B ont des chronomètres identiques et veulent les régler : mais ce sont des observateurs méticuleux comme il n’y en a guère ; ils exigent dans leur réglage une extraordinaire exactitude : ce sera, par exemple, non une seconde, mais un milliardième de seconde. Comment pourront-ils faire ? De Paris à Berlin, A envoie un signal télégraphique, avec un sans-fil, si vous voulez, pour être tout à fait moderne. B note le moment de la réception et ce sera pour les deux chronomètres l’origine des temps. Mais le signal emploie un certain temps pour aller de Paris à Berlin, il ne va qu’avec la vitesse de la lumière ; la montre de B serait donc en retard ; B est trop intelligent pour ne point s’en rendre compte ; il va remédier à cet inconvénient. La chose semble bien simple : on croîse les signaux, A reçoit et B envoie, on prend la moyenne des corrections ainsi faites, on a l’heure exacte. Mais cela est-il bien certain ? Nous supposons que de A à B le signal emploie le même temps que pour aller de B à A. Or A et B sont emportés dans le mouvement de la terre par rapport à l’éther, véhicule des ondes électriques. Quand A a envoyé son signal il fuit devant lui, B s’éloigne de même, le temps employé sera plus long que si les deux observateurs étaient au repos ; si au contraire c’est B qui envoie, A qui reçoit, le temps est plus court parce que A va au devant des signaux ; il leur est absolument impossible de savoir si leurs chronomètres marquent ou non la même heure. Quelle que soit la méthode employée les inconvénients restent les mêmes l’observation d’un phénomène astronomique, une méthode optique quelconque se heurtent aux mêmes difficultés, B ne pourra jamais connaître qu’une différence apparente de temps, qu’une espèce d’heure locale. Le principe de relativité s’applique intégralement.

Dans l’ancienne mécanique pourtant, on démontrait avec ce principe toutes les lois fondamentales. On pourrait être tenté de reprendre les raisonnements classiques et de raisonner comme il suit ? Soit encore deux observateurs, A et B pour les nommer comme on nomme toujours deux observateurs en mathématiques ; supposons les en mouvement, s’éloignant l’un de l’autre ; aucun d’eux ne peut dépasser la vitesse de la lumière ; par exemple B sera animé de 200 000 kilométres vers la droite, A de 200 000 vers la gauche. A peut se croire au repos et la vitesse apparente de B sera, pour lui, 400 000 kilomètres. Si A connait la mécanique nouvelle il se dira : B a une vitesse qu’il ne peut atteindre, c’est donc que moi aussi je suis en mouvement. Il semble qu’il pourrait décider de sa situation absolue. Mais il faudrait qu’il puisse observer le mouvement de B lui même ; pour faire cette observation A et B commencent par règler leurs montres, puis B envoie à A des télégrammes pour lui indiquer ses positions successives ; en les réunissant A peut se rendre compte du mouvement de B et tracer la courbe de ce mouvement. Or les signaux se propagent avec la vitesse de la lumière ; les montres qui marquent le temps apparent varient à chaque instant et tout se passera comme si la montre de B avançait. B croira aller beaucoup moins vite et la vitesse apparente qu’il aura relativement à A ne dépassera pas la limite qu’elle ne doit pas atteindre. Rien ne pourra révéler à A s’il est en mouvement ou en repos absolu.

Il faut encore faire une troisième hypothèse beaucoup plus surprenante, beaucoup plus difficile à admettre, qui gêne beaucoup nos habitudes actuelles. Un corps en mouvement de translation subit une déformation dans le sens même où il se déplace ; une sphère, par exemple, devient comme une espèce d’ellipsoïde aplati dont le petit axe serait parallèle à la translation. Si l’on ne s’aperçoit pas tous les jours d’une transformation pareille c’est qu’elle est d’une petitesse qui la rend presque imperceptible. La terre, emportée dans sa révolution sur son orbite se déforme environ de  : pour observer un pareil phénomène il faudrait des instruments de mesure d’une précision extrême, mais leur précision serait infinie qu’on n’en serait pas plus avancé car emportés eux aussi dans le mouvement ils subiront la même transformation. On ne s’apercevra de rien ; le mètre que l’on pourrait employer deviendra plus court comme la longueur qu’on mesure. On ne peut savoir quelque chose qu’en comparant à la vitesse de la lumière la longueur de l’un de ces corps. Ce sont là de délicates expériences, réalisées par Michelson et dont je ne vous exposerai pas le détail ; elles ont donné des résultats tout à fait remarquables ; quelqu’étranges qu’il nous paraissent, il faut admettre que la troisième hypothèse est parfaitement vérifiée.

Telles sont les bases de la nouvelle mécanique, avec l’appui de ces hypothèses on trouve qu’elle est compatible avec le principe de relativité.

Mais il faut la rattacher alors à une conception nouvelle de la matière.

Pour le physicien moderne, l’atome n’est plus l’élément simple ; il est devenu un véritable univers dans lequel des milliers de planètes gravitent autour de soleils minuscules. Soleils et planètes sont ici des particules électrisées soit négativement soit positivement ; le physicien les appelle électrons et bâtit le monde avec elles. D’aucuns se représentent l’atome neutre comme une masse centrale positive autour de laquelle circulent un grand nombre d’électrons chargés négativement, dont la masse électrique totale est égale en grandeur à celle du noyau central.

Cette conception de la matière permet de rendre compte aisément de l’augmentation de la masse d’un corps avec sa vitesse, dont nous avons fait un des caractères de la mécanique nouvelle. Un corps quelconque n’étant qu’un assemblage d’électrons, il nous suffira de le montrer sur ces derniers. Remarquons, à cet effet, qu’un électron isolé se déplaçant à travers l’éther engendre un courant électrique, c’est-à-dire un champ électromagnétique. Ce champ correspond à une certaine quantité d’énergie localisée non dans l’électron, mais dans l’éther. Une variation en grandeur ou en direction de la vitesse de l’électron modifie le champ et se traduit par une variation de l’énergie électromagnétique de l’éther. Alors que dans la mécanique newtonienne la dépense d’énergie n’est due qu’à l’inertie du corps en mouvement, ici une partie de cette dépense est due à ce que l’on peut appeler l’inertie de l’éther relativement aux forces électromagnétiques. L’inertie de l’éther augmente avec la vitesse et sa limite devient infinie lorsque la vitesse tend vers la vitesse de la lumière. La masse apparente de l’électron augmente donc avec la vitesse ; les expériences de Kaufmann montrent que la masse réelle constante de l’électron est négligeable par rapport à la masse apparente et peut être considérée comme nulle.

Dans cette nouvelle conception, la masse constante de la matière a disparu. L’éther seul, et non plus la matière, est inerte. Seul l’éther oppose une résistance au mouvement, si bien que l’on pourrait dire : il n’y a pas de matière, il n’y a que des trous dans l’éther. Pour les mouvements stationnaires ou quasi-stationnaires, la mécanique nouvelle ne diffère pas — au degré d’approximation de nos mesures près — de la mécanique newtonienne, avec cette seule différence que la masse n’est plus indépendante ni de la vitesse, ni de l’angle que fait cette vitesse avec la direction de la force accélératrice. Si par contre la vitesse a une accélération considérable, dans le cas, par ex., d’oscillations très rapides, il y a production d’ondes hertziennes représentant une perte d’énergie de l’électron entraînant l’amortissement de son mouvement. Ainsi, dans la télégraphie sans fil, les ondes émises sont dues aux oscillations des électrons dans la décharge oscillante.

Des vibrations analogues ont lieu dans une flamme et de même encore dans un solide incandescent. Pour Lorentz, il circule à l’intérieur d’un corps incandescent un nombre considérable d’électrons qui, ne pouvant pas en sortir, volent dans tous les sens et se réfléchissent sur sa surface. On pourrait les comparer à une nuée de moucherons enfermés dans un bocal et venant frapper de leurs ailes les parois de leur prison. Plus la température est élevée, plus le mouvement de ces électrons est rapide et plus les chocs mutuels et les réflexions sur la paroi sont nombreuses. À chaque choc et à chaque réflexion une onde électromagnétique est émise et c’est la perception de ces ondes qui nous fait paraître le corps incandescent.

Le mouvement des électrons est presque tangible, dans un tube de Crookes. Il s’y produit un véritable bombardement d’électrons partant de la cathode. Ces rayons cathodiques frappent violemment l’anticathode et s’y réfléchissent en partie donnant ainsi naissance à un ébranlement électromagnétique que plusieurs physiciens identifient avec les rayons Röntgen.

Il nous reste en terminant à examiner les relations de la mécanique nouvelle avec l’astronomie. La notion de masse constante d’un corps s’évanouissant, que deviendra la loi de Newton ? Elle ne pourra subsister que pour des corps en repos. De plus il faudra tenir compte du fait que l’attraction n’est pas instantanée. On peut donc se demander avec raison si la mécanique nouvelle ne va réussir qu’à compliquer l’astronomie sans obtenir une approximation supérieure à celle que nous donne la mécanique céleste classique. Mr. Lorentz a abordé la question. Partant de la loi de Newton supposée vraie pour deux corps électrisés au repos, il calcule l’action électrodynamique des courants engendrés par ces corps en mouvement ; il obtient ainsi une nouvelle loi d’attraction contenant les vitesses des deux corps comme paramètres. Avant d’examiner comment cette loi rend compte des phénomènes astronomiques, remarquons encore que l’accélération des corps célestes a comme conséquence un rayonnement électromagnétique, donc une dissipation de l’énergie se faisant ressentir en retour par un amortissement de leur vitesse. À la longue, les planètes finiront donc par tomber sur le soleil. Mais cette perspective ne peut guère nous effrayer, la catastrophe ne pouvant arriver que dans quelques millions de milliards de siècles. Revenant maintenant à la loi d’attraction, nous voyons aisément que la différence entre les deux mécaniques sera d’autant plus grande que la vitesse des planètes sera plus grande. S’il y a une différence appréciable, ce sera donc pour Mercure qu’elle sera la plus grande, Mercure ayant de toutes les planètes la plus grande vitesse. Or il arrive justement que Mercure présente une anomalie non encore expliquée : le mouvement de son périhélie est plus rapide que le mouvement calculé par la théorie classique. L’accélération est de 38″ trop grande. Leverrier attribua cette anomalie à une planète non encore découverte et un astronome amateur crut observer son passage au soleil. Depuis lors plus personne ne l’a vue et il est malheureusement certain que cette planète aperçue n’était qu’un oiseau. Or la mécanique nouvelle rend bien compte du sens de l’erreur relative à Mercure, mais elle laisse cependant encore une marge de 32″ entre elle et l’observation. Elle ne suffit donc pas à ramener la concordance dans la théorie de Mercure. Si ce résultat n’est guère décisif en faveur de la mécanique nouvelle, il est encore moins défavorable à son acceptation puisque le sens dans lequel elle corrige l’écart de la théorie classique est le bon. La théorie des autres planètes n’est pas sensiblement modifiée dans la nouvelle théorie et les résultats coïncident à l’approximation des mesures près à ceux de la théorie classique.

Pour conclure, il serait prématuré, je crois, malgré la grande valeur des arguments et des faits érigés contre elle, de regarder la mécanique classique comme définitivement condamnée. Quoiqu’il en soit d’ailleurs, elle restera la mécanique des vitesses très petites par rapport à celle de la lumière, la mécanique donc de notre vie pratique et de notre technique terrestre. Si cependant, dans quelques années sa rivale triomphe, je me permettrai de vous signaler un écueil pédagogique que n’éviteront pas nombre de maîtres, en France, tout au moins. Ces maîtres n’auront rien de plus pressé, en enseignant la mécanique élémentaire à leurs élèves, que de leur apprendre que cette mécanique là a fait son temps, qu’une mécanique nouvelle où les notions de masse et de temps ont une toute autre valeur la remplace ; ils regarderont de haut cette mécanique périmée que les programmes les forcent à enseigner et feront sentir à leurs élèves le mépris qu’ils lui portent. Je crois bien cependant que cette mécanique classique dédaignée sera aussi nécessaire que maintenant et que celui qui ne la connaîtra pas à fond ne pourra comprendre la mécanique nouvelle.